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LE CHEVALIER DE LA MORLIÈRE.

vâmes un embarras que nous ne cherchâmes point à dissimuler. Nous vîmes que nous nous compromettions mutuellement, et que notre véritable place, pour un tête-à-tête, était aux Porcherons ou à la Tour d’Argent.

Il en résulta que j’expédiai le souper avec plus de diligence que je ne l’aurais fait en toute autre occasion ; — mais je voulais être généreux et faire oublier sa méprise à la Du Barry.

Ses yeux, — ses beaux yeux, — m’en témoignèrent une véritable gratitude.

Les quelques paroles que nous échangeâmes furent banales et prononcées presque à demi-voix.

Après le dessert, elle se leva ; et, pour la première fois, me souriant comme elle aurait souri à Louis XV, elle me donna sa main à baiser.

J’y appuyai respectueusement mes lèvres ; — et, lorsque je relevai la tête avec une involontaire émotion, elle avait disparu.

Pauvre femme ! on dit que vous l’avez guillotinée.

X

DENISE

Le lendemain, je reçus une bourse de cent louis ; la favorite avait compris, à la fin.

Jamais argent n’était arrivé plus à propos ; Denise faillit en devenir folle de joie.

Cela nous fit vivre pendant une année, au bout de laquelle nous retombâmes dans la gêne. La cabale n’allait plus, j’avais renoncé définitivement au théâtre ; et puis, l’âge m’arrivant, je devins facile à