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LE CHEVALIER DE LA MORLIÈRE.

Je mourus comme j’avais vécu. N’ayant jamais donné, ainsi que je l’ai déjà dit, aucune preuve de philosophie ni de religion, je tournai le dos au prêtre qui vint pour m’assister à mes derniers moments.

— Mon fils, repentez-vous, me dit-il.

— Je ne fais que cela depuis vingt ans.

— Priez Dieu !

— Hein ? murmurai-je.

— Sa miséricorde est infinie, ajouta-t-il.

— Je ne l’ai prié que deux fois, répondis-je : la première, pour qu’il envoyât la Clairon au diable : la seconde, pour qu’il me conservât ma chère Denise ; il n’a exaucé ni l’une ni l’autre de mes prières. Je n’ai rien à lui demander pour moi.

— Cependant…

— Voyons, monsieur le prêtre, soyez de bonne composition et laissez-moi tranquille. Ne recommençons pas la comédie de Voltaire. Vous voyez bien que je n’ai pas la force de vous mettre à la porte.

Il sortit. Une heure après, je rendis le dernier soupir.

C’est tout, monsieur.

J’étais tellement décrié qu’aucun journal n’osa annoncer ma mort.

Relisez quelquefois Angola.