jours ne vous embarrasser jamais longtemps. Au bout d’un grand quart d’heure, nous étions déjà en conversation assez familière. Il me complimenta sur ma lettre à propos du divorce, qui venait de paraître dans le journal de Carra. Ensuite nous parlâmes de l’armée : il me dit que Biron avait été bien heureux de m’avoir possédée dans son camp ; cela nous amena tout naturellement à parler de Dumouriez. J’en fis le plus pompeux éloge, ajoutant que sur sa seule réputation je serais femme à me prendre de belle passion pour lui, fût-il un magot. Ce monsieur me répondit : « Dumouriez, madame, a eu votre portrait dans ses mains ; de plus, il a beaucoup entendu vanter les charmes de votre esprit, et, en vérité, il vous aime ! Disant cela, l’inconnu m’appliqua un baiser. — Monsieur, de quel droit venez-vous m’insulter ? Sortez, je vous prie ; sortez ! — Madame, je ne sortirai pas que vous ne m’ayez promis de venir dîner au camp chez Dumouriez. — Êtes-vous fou, monsieur ? La belle recommandation que d’être présentée par vous ! »
« Quelques moments plus tard, j’allai me promener dans le jardin des bains : j’aperçus mon écervelé avec deux ou trois généraux ; comme je passais près de lui, je lui fis un petit salut de protection. À quelques pas de là, je rencontrai un officier dont l’âge et l’air d’honnêteté invitaient à la confiance. « Monsieur, lui dis-je en l’abordant, oserai-je vous demander quel est ce militaire aux cheveux plats, en lévite blanche, qui cause avec ces généraux ? — Madame, c’est le conquérant Dumouriez. — Que dites-vous ? Mais Dumouriez doit avoir cinquante ans, et celui-ci a l’air d’un jeune homme ! — Madame, c’est le géné-