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LA MORENCY.

ni même pour personne… Je ne puis passer sous silence que, dans l’intervalle que nous fûmes bien ensemble, je lui fis cadeau d’un exemplaire en vélin d’Illyrine ou l’Écueil de l’inexpérience, et qu’il n’a pas eu la délicatesse de me payer d’une manière quelconque. Comme cet ouvrage, dans plusieurs endroits, peut flatter sa vanité, il l’a reçu avec plaisir. — J’oubliais de te dire qu’il est époux et père ; il a épousé une adolescente qui lui a donné deux rejetons ; ils habitent ensemble dans un département de la ci-devant Picardie, où le gouvernement a encore eu la générosité de donner à ce grand inutile de France une préfecture, etc., etc. »

Voilà pour son amant.

Son mari a aussi son compte, quelques pages plus loin. « Je sais qu’il habite une petite campagne ; qu’il s’occupe des plaisirs champêtres et qu’il finit par pratiquer les vertus rurales. Irai-je fermer les yeux à cet époux aussi extraordinaire par ses rares qualités que ses nombreux défauts ? Je l’ignore encore. Mon orgueil ne fera pas le premier pas ; il est aussi indestructible que mes sentiments pour lui, qui reprirent toujours une espèce de consistance dans les lacunes que j’ai eues d’une passion à une autre. Sans doute le gage de notre hymen a beaucoup contribué à ces petites réminiscences, et ma Clarisse (cette charmante enfant promet et donne les plus douces espérances) est l’objet des adorations de son père, qui a reporté sur elle la tendresse qu’il avait eue pour sa Suzanne. »

Quel langage ! quelles idées ! Est-il possible de montrer plus de naïveté dans la corruption ?