Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/28

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et qui passe par des crises d’abattement, où il s’écrie avec dégoût: € F ai la maladie de faire des livres et d’en être honteux quand je les ai faits1. »

Nous n’insisterons point sur la tragédie de Britomare, ni sur les Dialogues mythologiques, dont certains passages nous ont été conservés. Quelques opuscules de moindre importance ne nous arrêteront pas davantage. Au contraire, nous signalerons que l’auteur des Lettres Persanes, après avoir entrepris une Histoire de la Jalousie, qu’il changea plus tard en Réflexions sur le même sujet, voulut composer, sous une forme nouvelle : un De Officiis, comme Cicéron, et un II Principe, comme Machiavel.

Ainsi Montesquieu passa de la Psychologie à la Morale et de la Morale à la Politique. La Politique ne le lâcha plus. Mais il demeura toujours moraliste et psychologue; ce qui donne à ses doctrines une incomparable fermeté.

Notez que, même lorsqu’il écrivit sur l’histoire, il y chercha la démonstration de quelques vérités politiques. On n’estimait pas, alors, que le plus noble emploi du génie fût de produire un livre qui ne prouvât rien. Dans ses Considérations sur la Grandeur des Romains (comme dans sa Monarchie universelle), il s’efforce d’établir les périls qu’entraînent les grandes conquêtes, « Ut lapsu graviore ruant, » telle était l’épigraphe qu’il avait empruntée à Claudien, pour son œuvre. Il l’a traduite, en la commentant, dans un passage du chapitre xv, qui est comme la clé de voûte de l’œuvre entière.

Et ce qui nous est parvenu des ouvrages qu’avait commencés Montesquieu, l’un, sur l’ensemble de l’histoire de France, et l’autre, sur le règne de Louis XIV, nous permet d’induire aussi que les réflexions politiques devaient y occuper une large place.