Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/385

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de besoins (sic) du talent qu’il avoit de se faire des créatures.

Le Duc mena le Roi contre les Liégeois. Ils n’avoient que la force ordinaire du Peuple, c’està-dire des quarts d’heure de fureur. Cette ville 5 prise, la Religion fit épargner les temples, et l’Humanité ne fit rien pour les citoyens.

Le comte de Saint-Pol étoit un homme fin, qui choisissoit très mal ses dupes : car il entreprit de jouer trois hommes, dont le premier se piquoit de 10 tromper tous les autres ; le second étoit l’homme du Monde qui aimoit le moins à être joué ; et tous trois étoient infiniment plus puissants que lui. Il ôta donc à trois grands princes l’intérêt qu’ils auroient eu de le protéger. 15

Il est étonnant que le duc de Bourgogne voulût ôter au Roi cette épine du pied, qui l’auroit embarrassé toute sa vie : car il éprouva bien que le reste de la Noblesse françoise étoit fidèle.

Le duc de Bourgogne entra dans le Royaume, et 2o celui qui avoit été à la tête du Bien public du Royaume y mit tout à feu et à sang.

Le Roi laissa son rival se consommer par ses guerres, par ses défaites, par ses victoires ; il lui auroit plutôt donné des secours pour l’aider 25 à se perdre. En effet, ce prince incapable des leçons de la bonne ou de la mauvaise fortune, plus aisé à détruire qu’à corriger, se faisoit partout des périls et se chargeoit des querelles de ses voisins comme des siennes. 3o

Louis goûtoit le plaisir que trouvent les âmes peu