Page:Moréas - Esquisses et Souvenirs, 1908.djvu/92

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Sommes-nous les victimes de l’Anglais Thomson et de son élève Jean-Jacques ? Que dis-je ! Notre âme a pris le pli. Nous ne pouvons pas être infidèles à notre âme. Efforçons-nous seulement à tirer un peu de beauté de ses caprices et de sa folie.

Le divin Chénier, né d’une mère grecque, se laissait aussi trop alanguir. Au bord d’un fleuve pur, sous de beaux feuillages, il inclinait sa tête sur son sein, et il évoquait des fantômes :

Ces fantômes si beaux, de nos cœurs tant aimés…

Lamartine qui, n’ayant presque que la poétique de Parny sous la main, sut s’élever au zénith de l’inspiration, et s’épancher, comme Virgile, en grand fleuve d’harmonie, a voulu mêler son âme avec les derniers soupirs du vent du soir dans les pampres, ou avec la lueur du dernier rayon de l’année sur les sommets rosés de neige des montagnes. Il a subi toutes nos modernes langueurs de l’Automne :

Salut, bois couronnés d’un reste de verdure !
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours ! le deuil de la nature
Convient à ma douleur et plait à mes regards.

L’Automne de Lamartine est une composition de sa jeunesse. Il produisit plus tard des strophes plus fortes. Toutefois, il est permis de penser que ses premiers ouvrages, dans leur ensemble, sont, peut-