Page:Moréas - Poèmes et Sylves, 1907.djvu/221

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ô ma muse, quittons ce fleuve et ces campagnes,
et Pluton, et les sœurs que l’on n’ose nommer,
et que cette ombre enfin rejoigne ses compagnes
qui sont mortes d’aimer.
Je vois la triste Phèdre, innocente et coupable,
myrrhe qui consomma son désir exécrable,
d’un funeste présage Aglaure déchirée
et Canacé, épouse et sœur de Macarée,
la reine de Lemnos, qui brûla pour son hôte
le parjure Jason, l’intrépide Argonaute,
Héro, Laodamie, Hermione, Eurydice,
Cydippe, prise aux lacs d’un fatal artifice,
Procris au tendre cœur, jalouse de l’aurore,
Hypermnestre, Evadné, cette Phyllis encore,
et la sage Didon, que le pieux Enée
pour obéir aux dieux avait abandonnée.
Comme ce pâle essaim de malheureuses ombres,
du Styx au triple tour couvrant les rives sombres,
au penser doux-amer de son ancien martyre