Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/131

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l’arrêtèrent. Ô Dieu ! je l’ai vue là sur ses genoux, les mains jointes, inclinée sur la pierre ; le vent la faisait vaciller devant moi comme les bruyères qui nous environnaient. Frêle et sublime créature ! elle priait pour son amour. Je la soulevai dans mes bras. « Ô mon unique amie ! m’écriai-je, ô ma maîtresse, ma mère et ma sœur ! demande aussi pour moi que je puisse t’aimer comme tu le mérites ! Demande que je puisse vivre ! que mon cœur se lave dans tes larmes ; qu’il devienne une hostie sans tache, et que nous la partagions devant Dieu ! »

Nous nous renversâmes sur la pierre. Tout se taisait autour de nous ; au-dessus de nos têtes se déployait le ciel resplendissant d’étoiles. « Le reconnais-tu ? dis-je à Brigitte ; te souviens-tu du premier jour ? »

Dieu merci, depuis cette soirée, nous ne sommes jamais retournés à cette roche. C’est un autel qui est resté pur ; c’est un des seuls