Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/167

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effacé le souvenir du mal que je lui avais fait. Je m’efforçai de lui prouver que ce qui avait été hier serait encore demain ; je lui répétai que je ne pouvais que la rendre malheureuse, que s’attacher à moi c’était faire de moi un assassin. J’employai la prière, les serments, la menace même ; elle ne me répondit qu’un mot : « Tu pars, emmène-moi ; quittons le pays, quittons le passé. Nous ne pouvons plus vivre ici ; allons ailleurs, où tu voudras ; allons mourir dans un coin de la terre. Il faut que nous soyons heureux, moi par toi, toi par moi. »

Je l’embrassai avec un tel transport que je crus sentir mon cœur se briser. « Pars donc ! » criai-je au postillon. Nous nous jetâmes dans les bras l’un de l’autre, et les chevaux partirent au galop.