Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/244

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faible crâne, c’en est fait, nous n’en répondons plus.

Tandis que, du jour au lendemain, je remettais sans cesse ce départ, je perdais la force et le sommeil, et peu à peu, sans que je m’en aperçusse, toute la vie m’abandonnait. Lorsque je m’asseyais à table, je me sentais un mortel dégoût ; la nuit, ces deux pâles visages, celui de Smith et de ma maîtresse, que j’observais tant que durait le jour, me poursuivaient dans des rêves affreux. Lorsqu’ils allaient le soir au spectacle, je refusais d’y aller avec eux ; puis je m’y rendais de mon côté, je me cachais dans le parterre, et de là je les regardais. Je feignais d’avoir à faire dans la chambre voisine, et j’y restais une heure à les écouter ; tantôt l’idée de chercher querelle à Smith et de le forcer à se battre avec moi me saisissait avec violence ; je lui tournais le dos pendant qu’il me parlait ; puis je le voyais, d’un air de surprise,