Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/248

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je ne fis que parler de Salsdorf, et ne me souciai de quoi que ce soit. Je ne pensai pas, à coup sûr, à soupçonner personne ce jour-là. Pauvre rêveur ! devais-je alors me souvenir que j’avais été bon ? À quoi cela me servait-il ? à tendre au ciel des bras désolés, à me demander pourquoi j’étais au monde, et à chercher autour de moi s’il ne tomberait pas aussi quelque obus qui me délivrât pour l’éternité. Hélas ! ce n’en était que l’éclair qui traversait un instant ma nuit.

Comme ces derviches insensés qui trouvent l’extase dans le vertige, quand la pensée, tournant sur elle-même, s’est épuisée à se creuser, lasse d’un travail inutile, elle s’arrête épouvantée. Il semble que l’homme soit vide, et qu’à force de descendre en lui il arrive à la dernière marche d’une spirale. Là, comme au sommet des montagnes, comme au fond des mines, l’air manque, et Dieu défend d’aller plus loin. Alors, frappé d’un froid mortel, le