Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/269

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paraissait réfléchir et marchait lentement devant moi.

Je la suivais d’un œil avide, et le silence qu’elle gardait augmentait par degrés ma colère. Je ne voulais pas qu’elle s’en aperçût, et ne savais quel parti prendre. J’ouvris la fenêtre. « Qu’on dételle les chevaux, criai-je, et qu’on les paie. Je ne partirai pas ce soir.

— Pauvre malheureux ! dit Brigitte. » Je refermai tranquillement la fenêtre et me rassis sans avoir l’air d’entendre ; mais je me sentais une telle rage que je n’y pouvais résister. Ce froid silence, cette force négative m’exaspéraient au dernier point. J’aurais été réellement trompé, et sûr de la trahison d’une femme aimée, que je n’aurais rien éprouvé de pire. Dès que je me fus condamné moi-même à rester encore à Paris, je me dis qu’à tout prix il fallait que Brigitte parlât ; je cherchais en vain dans ma tête un moyen de l’y obliger, mais, pour le trouver à l’instant