Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/273

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saisis la main. « Assieds-toi là, lui dis-je, et écoute-moi.

— À quoi bon ? ce n’est pas vous qui parlez. »

J’étais honteux de ma propre feinte, et j’y renonçai.

« Écoutez-moi, répétai-je avec force, et venez, je vous en supplie, vous asseoir ici près de moi. Si vous voulez garder le silence, faites-moi du moins la grâce de m’entendre.

— J’écoute ; qu’avez-vous à me dire ?

— Si on me disait aujourd’hui : Vous êtes un lâche ; j’ai vingt-deux ans et je me suis déjà battu ; ma vie entière, mon cœur se révolteraient. N’aurais-je pas en moi la conscience de ce que je suis ? il faudrait pourtant aller sur le pré, il faudrait que je me misse vis-à-vis du premier venu, il faudrait jouer ma vie contre la sienne ; pourquoi ? pour prouver que je ne suis pas un lâche ; sans quoi le monde le croirait. Cette seule parole demande