Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/296

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m’avait dit, et je disposais autour d’elle tout ce que je savais d’habitude qu’on lui préparait pour la nuit ; puis je la regardais, puis j’allais à la fenêtre et j’y restais le front collé aux vitres, devant un grand ciel sombre et lourd ; puis je revenais près du lit. Partir demain, c’était ma seule pensée, et peu à peu ce mot de partir me devenait intelligible. « Ah Dieu ! m’écriai-je tout à coup, ma pauvre maîtresse, je vous perds, et je n’ai pas su vous aimer ! »

Je tressaillis à ces paroles, comme si c’eût été un autre que moi qui les eût prononcées ; elles retentirent dans tout mon être, comme dans une harpe tendue un coup de vent qui va la briser. En un instant, deux ans de souffrances me traversèrent le cœur, et, après elles, comme leur conséquence et leur dernière expression, le présent me saisit. Comment rendrai-je une pareille douleur ? Par un seul mot peut-être, pour ceux qui ont aimé. J’avais