Page:Musset - Poésies, édition Nelson.djvu/63

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Miss Smolen s’éloignait, la rougeur sur le front;
Sur le bord du balcon elle resta penchée.

Oh! qui l’a bien connu, ce mouvement profond,
Ce charme irrésistible, intime, auquel se livre
Un cœur dans ces moments de lui-même surpris,
Qu’aux premiers battements un doux mystère enivre,
Jeune fleur qui s’entr’ouvre à la fraîcheur des nuits!
Fille de la douleur, harmonie! harmonie!
Langue que pour l’amour inventa le génie!
Oui nous vint d’Italie, et qui lui vint des cieux!
Douce langue du cœur, la seule où la pensée,
Cette vierge craintive et d’une ombre offensée,
Passe en gardant son voile, et sans craindre les yeux!
Oui sait ce qu’un enfant peut entendre et peut dire
Dans tes soupirs divins nés de l’air qu’il respire,
Tristes comme son cœur, et doux comme sa voix?
On surprend un regard, une larme qui coule;
Le reste est un mystère ignoré de la foule,
Comme celui des flots, de la nuit et des bois!...

Oh ! quand tout a tremblé, quand l’âme tout entière
Sous le démon divin se sent encor frémir,
Pareille à l’instrument qui ne peut plus se taire,
Et qui d’avoir chanté semble longtemps gémir...
Et quand la faible enfant, que son délire entraîne,
Mais qui ne sait d’amour que ce qu’elle en rêva,