Page:Musset - Poésies, édition Nelson.djvu/81

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Font quelquefois de loin sourire tristement,
Qu’importent cette mer, son calme et ses tempêtes,
Et ces mondes sans nom qui roulent sur nos têtes,
Et le temps et la vie, au cœur qui t’a connu?
Fils de la Volupté, père des Rêveries,
Tes filles sur ton front versent leurs fleurs chéries,
Ta mère en soupirant t’endort sur son sein nu!
 
A cette heure d’espoir, de mystère et de crainte
Où l’oiseau des sillons annonce le matin,
Tiburce de la ville avait gagné l’enceinte,
Et de son pauvre toit reprenait le chemin.
Tout se taisait au loin dans les blanches prairies;
Tout, jusqu’au souvenir, se taisait dans son cœur.
Pour la nature et l’homme, ainsi parfois la vie
A ses jours de soleil et ses jours de bonheur.
C’est une pause, un calme, une extase indicible.
Le Temps, — ce voyageur qu’une main invisible,
D’âge en âge, à pas lents, mène à l’éternité, —
Sur le bord du chemin, pensif, s’est arrêté.
 
Ah 1 brûlante, brûlante, ô nature ! est la flamme
Que d’un être adoré la main laisse à la main,
Et la lèvre à la lèvre, et l’âme au fond de l’âme!
Devant tes voluptés, ô Nuit ! c’est le Matin
Qui devrait disparaître et replier ses ailes!
Pourquoi te réveiller, quand, loin des feux du jour,