Page:NRF 17.djvu/225

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

yOTES 2 1 9

ses scrupules religieux. L'inconnu féminin effrayait ce colosse vierge. »

Bien peu de romanciers, prenant comme sujet la sensualité féminine, ont osé l'étudier isolément, sans le voile du senti- ment. Cette hardiesse seule suffirait à donner au livre posthume d'Eugène Le Roy une originalité positive.

JACQUES DE LACRETELLE

��*

  • *

��LES RUSTIQUES, par Louis Pergaud (Mercure de France).

La figure de Louis Pergaud, tombé devant Verdun en 191 5, revit avec son élan juvénile dans la préface que Lucien Des- caves vient d'écrire à Rustiques. De sa Franche-Comté l'auteur avait gardé la robustesse native, et une gaillardise qui se donne libre cours dans ces nouvelles villageoises. Peu ou point de littérature, qui l'eût gâté, qui le gâtait dès qu'il s'en souciait. Son mérite est dans la fraîcheur des impressions, et le naturel du rendu. Il a eu la bonne fortune de courir les champs avant de tenir une plume. Fouler avec les bœufs l'herbe aromatique du pâturage, se mouiller les jambes à la rosée du trèfle en fleurs, accorder une existence qui n'est point toute physique au rythme du soleil et des saisons, et à la vivacité des sensa- tions ajouter un peu de rêve, à l'heure où la lune fait briller une escarboucle dans les mares, voilà qui n'est point négli- geable dans une formation artiste. Pergaud a dû à tout cela le meilleur de lui-même, la matière d'un art élémentaire qui n'est pas méprisable, qui rafraîchit.

Mais il avait, lui aussi, appris des livres, et de Maupassant, à faire une nouvelle avec les bonnes histoires que l'on raconte depuis Till Ulenspiegel. Au moins ne prétend-il guère à conter autrement qu'au débraillé, et ses bonshommes ont la franche enluminure d'Epinal. Pourtant après ces pages, et tant d'autres où passe une bonne odeur de terre, le roman de la vie paysanne reste à écrire : celui où seraient découverts les canaux subtils par lesquels communique avec la civili- sation ce monde de la demi-animalité, que l'on n'a guère saisi que par les dehors, et qui, parfois, a de bien vives trans- figurations. . FÉLIX BERTAUX

�� �