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2IO LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

offre dans cet album, plus abondante, est par là même plus inégale, elle ne déborde pas moins vers l'excellent que vers le pire.

" Le spectacle est prodigieux de ces corps tendus et écroulés, de ces membres délirants, de ces croupes bovines, de ces jambes de chèvre, de ces seins et de ces pis, de ces cuisses qui s'ouvrent comme des ciseaux, de ces sexes éperdus à la fente démesurée. Des lignes de toutes les formes, de toutes les courbures, de toutes les cassures, beaucoup de cercles, d'arcs, de rhombes et de masses ovoïdes. " — Si telle matière pousse déjà la plume si sage de M. de Gourmont à de telles intempéries, on me saura gré de n'insister pas davantage à mon tour.

Mais pourquoi M. de Gourmont écrit-il en manière de conclusion : " C'est ici un livre de vie, et non un livre de rêve. " — C'est être bien tendancieux. J'espérais que nous n'en étions plus à prendre pour conditions du réalisme, l'atro- cité, l'obscénité, la hideur. Serait-il plus paradoxal d'admirer au contraire en ces dessins une idéalisation puissante ? A qui faut-il encore apprendre que l'idéalisation de l'art n'opère pas forcément dans le sens de ce que le public appelle ordinaire- ment : la beauté. Qui dit suppression du neutre, du banal, de l'indifférent, au profit de ce que veut l'artiste, dit : idéalisation. Pour vivre plus intensément, certains dessins de M. Rouveyre sont d'une effarante hideur. Qu'importe ! L'ennemi, ce n'est pas le laid ; c'est le médiocre.

Que M. Rouveyre se méfie cependant de cette complaisance à l'atroce. Un Tertullien y pourrait bien trouver son compte, sourire à tant d'outrance et, par une volontaire méprise, lire dans l'étalage de tant de chair si surmenée, une invite pos- sible à la macération... Mais nous voici bien loin de M. de Gourmont ! A. G.

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��LES EAUX-FORTES DE M. BRANGWYN.

On a reproché aux eaux-fortes de M. Brangwyn leurs

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