Page:Nerciat - Félicia.djvu/117

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE X


C’est le chevalier qui parle.


« Le funeste président nous faisant visiter tous les recoins de sa maison, avec autant d’exactitude que si nous eussions été un détachement de maréchaussée, commandé pour y déterrer quelque malfaiteur, avait annoncé la pièce où nous sommes maintenant comme l’appartement de sa fille, et celle d’en haut, où je suis venu m’égarer, comme l’une des chambres qu’il donne aux étrangers, en attendant que le premier soit en état. La droite est pour les femmes, les hommes sont de l’autre côté. Ayant bien mis cette distribution dans ma tête, assuré d’ailleurs que Sylvina devait occuper au-dessous le bel appartement et présumant en conséquence que tu coucherais nécessairement dans une chambre où il n’y aurait qu’un lit, il me semblait que rien ne pouvait s’opposer au bonheur de passer la nuit avec toi ; je suis donc parti pour le quartier des femmes, dès que j’ai présumé que tout le monde pouvait à peu près dormir. J’ai porté la main sur plusieurs serrures ; enfin j’ai trouvé la clef dans l’une, j’ai ouvert. Quelqu’un dormait, mais au bruit que j’ai fait, on s’est éveillé… J’hésitais. — Entre donc, Saint-Jean, a dit très distinctement une voix que j’ai reconnue tout de suite pour celle d’Éléonore ; alors il m’est venu l’idée la plus folle. La répugnance de passer pour Saint-Jean et la curiosité de voir quel micmac allait naître de ma visite m’ont fait commencer sur l’heure le rôle de somnambule, et sans répondre à la voix, je me suis mis à déclamer assez bas. — Jardin délicieux où la divine Cloé vient chaque matin disputer à la rose et au jasmin le prix de la fraîcheur… Lieux enchantés où le serment d’un amour à l’épreuve des siècles précéda le vœu que nous prononçâmes au pied des autels… (Je me suis assis). Fontaine plus limpide que celle de Vaucluse ! Cristal, où mon épouse chérie… — Ah çà, Saint-Jean, a inter-