Page:Nerval - Le Rêve et la Vie, Lévy, 1868.djvu/138

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Sylvie au spectacle, et je lui ai demandé si elle ne trouvait pas que l’actrice ressemblait à une personne qu’elle avait connue déjà.

— À qui donc ?

— Vous souvenez-vous d’Adrienne ?  

Elle partit d’un grand éclat de rire en disant :

— Quelle idée !  

Puis, comme se le reprochant, elle reprit en soupirant :

— Pauvre Adrienne ! elle est morte au couvent de Saint-S…, vers 1832. 


CHANSONS ET LÉGENDES DU VALOIS
vieilles ballades françaises

Chaque fois que ma pensée se reporte aux souvenirs de cette province du Valois, je me rappelle avec ravissement les chants et les récits qui ont bercé mon enfance. La maison de mon oncle était toute pleine de voix mélodieuses, et celles des servantes qui nous avaient suivis à Paris chantaient tout le jour les ballades joyeuses de leur jeunesse, dont malheureusement je ne puis citer les airs. J’en ai donné plus haut quelques fragments. Aujourd’hui, je ne puis arriver à les compléter, car tout cela est profondément oublié ; le secret en est demeuré dans la tombe des aïeules. Avant d’écrire, chaque peuple a chanté ; toute peine s’inspire à ces sources naïves, et l’Espagne, l’Allemagne, l’Angleterre, citent chacune avec orgueil leur romancero national. Pourquoi la France n’a-t-elle pas le sien ? On publie aujourd’hui les chansons patoises de Bretagne ou d’Aquitaine, mais aucun chant des vieilles provinces où s’est toujours parlé la vraie langue française ne nous sera conservé. Je crains encore que le travail qui se prépare ne soit pas purement au point de vue historique et scientifique. Nous aurons des ballades franques, nor-