Page:Nerval - Le Rêve et la Vie, Lévy, 1868.djvu/365

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sommeil qui succéda à cette soirée. Mon esprit, surexcité sans doute par les souvenirs de la nuit précédente, et un peu par l’aspect du pont des Arches, qu’il fallut traverser pour me rendre à l’hôtel, imagina le rêve suivant, dont le souvenir m’est fidèlement resté :


XVII

CAPHARNAÜM

Des corridors, des corridors sans fin ! Des escaliers, des escaliers où l’on monte, où l’on descend, où l’on remonte, et dont le bas trempe toujours dans une eau noire agitée par des roues, sous d’immenses arches de pont… à travers des charpentes inextricables ! Monter, descendre, ou parcourir les corridors, et cela, pendant plusieurs éternités… Serait-ce la peine à laquelle je serais condamné pour mes fautes ?

J’aimerais mieux vivre !

Au contraire, voilà qu’on me brise la tête à grands coups de marteau : qu’est-ce que cela veut dire ?

Je rêvais à des queues de billard… à des petits verres de verjus

« Monsieur et mame le maire est-il content ? »

Bon ! je confonds à présent Bilboquet avec Macaire. Mais ce n’est pas une raison pour qu’on me casse la tête avec des foulons.

« Brûler n’est pas répondre ! »

Serait-ce pour avoir embrassé la femme à cornes, ou avoir promené mes doigts dans sa chevelure de mérinos ?

« Qu’est-ce que c’est donc que ce cynisme ! » dirait Macaire.

Mais Desbarreaux le cartésien répondrait à la Providence :

« Voilà bien du tapage pour… bien peu de chose. »