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LES FILLES DU FEU

être lettré, comprend le respect que l’on doit aux antiquités. Il nous fit voir dans une des salles un moine qu’il avait découvert dans les ruines. À voir ce squelette couché dans une auge de pierre, j’imaginai que ce n’était pas un moine, mais un guerrier celte ou frank couché selon l’usage, — avec le visage tourné vers l’Orient, dans cette localité, où les noms d’Erman ou d’Armen[1] sont communs dans le voisinage, sans parler même d’Ermenonville, située près de là, — et qu’on appelle dans le pays Arme-Nonville ou Nonval, qui est le terme ancien.

Le pâté des ruines principales forme les restes de l’ancienne abbaye, bâtie probablement vers l’époque de Charles VII, dans le style du gothique fleuri, sur des voûtes carlovingiennes aux piliers lourds, qui recouvrent les tombeaux. Le cloître n’a laissé qu’une longue galerie d’ogives qui relie l’abbaye à un premier monument, où l’on distingue encore des colonnes byzantines taillées à l’époque de Charles le Gros, et engagées dans de lourdes murailles du seizième siècle.

— On veut, nous dit le fils du garde, abattre le mur du cloître pour que, du château, l’on puisse avoir une vue sur les étangs. C’est un conseil qui a été donné à Madame.

— Il faut conseiller, dis-je, à votre dame de faire ouvrir seulement les arcs des ogives qu’on a remplis de maçonnerie, et alors la galerie se découpera sur les étangs, ce qui sera beaucoup plus gracieux.

Il a promis de s’en souvenir.


La suite des ruines amenait encore une tour et une

  1. Hermann, Arminius, ou peut-être Hermès.