Page:Nerval - Petits Châteaux de Bohême, 1853.djvu/55

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pense à des choses folles, je ne puis demeurer en place, et j’ai peur de me fatiguer. Tenons-nous compagnie l’un à l’autre un instant ; je vaux bien une bouteille pour l’ivresse, et cependant je ne suis rempli que de joie ; j’ai besoin de m’épancher comme un flacon de sillery, et je veux jeter dans votre oreille un secret étourdissant.

FABIO. — De grâce, choisissez un confident moins préoccupé de ses propres affaires. J’ai la tête prise, mon cher ; je ne suis bon à rien ce soir, et, eussiez-vous à me confier que le roi Midas a des oreilles d’âne, je vous jure que je serais incapable de m’en souvenir demain pour le répéter.

MARCELLI. — Et c’est ce qu’il me faut, vrai Dieu ! un confident muet comme une tombe.

FABIO. — Bon ! ne sais-je pas vos façons ?… Vous voulez publier une bonne fortune, et vous m’avez choisi pour le héraut de votre gloire.

MARCELLI. — Au contraire, je veux prévenir une indiscrétion, en vous confiant bénévolement certaines choses que vous n’avez pas manqué de soupçonner.