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VOYAGE EN ORIENT.

ment. Après cela, je remercie Dieu des faveurs qu’il vous a faites, il n’est point d’autre Dieu que lui, et je prie de bénir Mahomet et sa famille. Je sais, ô Gamrou, par le rapport qui m’a été fait, que la province où vous commandez est belle et bien fortifiée, bien cultivée, et bien peuplée ; que les Pharaons et les Amalécites y ont régné ; qu’ils y ont fait des ouvrages exquis et des choses excellentes ; qu’ils y ont étalé les marques de leur grandeur et de leur orgueil, s’imaginait être éternels, et prenant où ils n’avaient point fait de compte. Cependant Dieu vous a établi en leurs demeures, et a mis en votre puissance leurs biens et leurs serviteurs et leurs enfants, et vous a fait hériter de leur terre. Qu’il en soit loué et béni et remercié ; c’est à lui qu’appartient l’honneur et la gloire. Quand vous aurez lu ma lettre que voici, écrivez-moi les qualités particulières de l’Égypte, tant en sa terre qu’en sa mer, et me la faites connaître comme si je la voyais moi-même. »

Amrou, ayant reçu cette lettre, et vu ce qu’elle contenait, fit réponse à Omar ; il lui écrivit en ces termes :

« De la part de Gabdolle ; fils du Gase, fils de Vaïl Le Saharien, au successeur de l’apôtre de Dieu, à qui Dieu fasse paix et miséricorde, Omar, fils du Chettabe, commandeur des fidèles, l’un des califes suivant le droit chemin, dont j’ai reçu et lu la lettre et entendu l’intention ; c’est pourquoi je veux ôter de dessus son esprit la nuée de l’incertitude par la vérité de mon discours. C’est de Dieu que viendra la force et la puissance, et toutes choses retournent à lui. Sachez, seigneur commandeur des fidèles, que le pays d’Égypte n’est autre chose que des terres noirâtres et des plantes vertes entre une montagne poudreuse et un sable rougeâtre. Il y a entre sa montagne et son sable des plaines relevées et des éminences abaissées. Elle est environnée d’un penchant qui lui fournit de quoi vivre, et qui a de tour, depuis Syène jusqu’à la fin de la terre et au bord de la mer, un mois de chemin pour un homme de cheval. Par le milieu du pays, il descend un fleuve béni au matin et favorisé du ciel au soir, qui coule en augmentant et en diminuant, sui-