Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’empire, quand le canon des Invalides tonnait pour annoncer les suprêmes succès de l’empereur, on se disait tristement, en se rencontrant dans les rues de Paris : « Hélas ! ce n’est qu’une victoire ! » Songe-t-on aussi à ce que devaient dire aux intelligences et aux cœurs les contrastes du présent avec le passé : la fille de Louis XVI rentrant, au milieu des acclamations d’une population enthousiaste, dans ce palais des Tuileries qu’elle n’avait pas revu depuis la journée du 10 août ; Louis XVIII traversant dans son carrosse royal, suivi de ses gardes du corps, la place du 21 janvier, et les reliques de Louis XVI et de Marie-Antoinette allant, au milieu des gémissements et des larmes, par une froide journée d’hiver, choisie pour cette funèbre restauration, en mémoire d’un lamentable anniversaire, prendre possession de leurs sépulcres dans les caveaux de Saint-Denis ?

Pendant que ce spectacle des choses humaines jetait de graves pensées et de religieuses émotions dans un grand nombre d’âmes, il était, pour un certain nombre d’autres engagées, soit par leurs précédents, soit par leurs doctrines, dans les voies de la révolution, l’objet d’idées et de sentiments contraires. Il y en avait qui voyaient avec peine ce retour imprévu qui leur paraissait un pas rétrograde vers un passé qu’ils croyaient irrévocablement condamné. Il leur semblait que la France venait de reculer jusqu’au delà de 1792, et ces hommages rendus à la royauté vivante, ces réparations funèbres faites à la royauté morte, leur paraissaient