Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/37

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dans notre littérature. Il combat les fausses idées qui prévalent en France, déteste les crimes qui y ont été commis ; mais il aime la France, il est Français par le cœur comme par l’esprit, il ne désespère jamais d’elle ; il l’attend avec la patience que Dieu a, parce qu’il est éternel, et que nous avons envers cette bien-aimée patrie, parce que nous sommes ses fils. Il ne conçoit pas plus l’Europe sans la France que le corps sans la tête ou que la tête sans le cerveau, et il est tellement convaincu que la France est nécessaire au monde, qu’il va jusqu’à se réjouir des victoires qu’elle remporte contre des puissances européennes qui semblent soutenir les idées qu’il défend, parce que rien ne saurait compenser à ses propres yeux l’effroyable malheur de la disparition de la France. Si ses sentiments n’étaient exprimés que dans les Considérations, on pourrait jusqu’à un certain point n’y voir qu’une précaution habile prise par l’auteur, pour faire accepter la sévérité de quelques-uns de ses jugements. Mais on retrouve dans sa correspondance intime l’expression des mêmes sentiments. « La France, écrit-il en 1794 de Lausanne[1], a toujours tenu et tiendra longtemps, suivant les apparences, un des premiers rangs dans la société des nations. D’autres nations, ou pour mieux dire leurs chefs, ont voulu profiter, contre toutes les règles de la morale, d’un accès de fièvre chaude qui était venu assaillir les Fran-

  1. Lettres et opuscules : Lettre à M. le baron de V… Lausanne, 28 octobre 1794.