Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/454

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rier. Il sacrifiait la tête de la société à ses membres inférieurs, il humiliait les loges devant le parterre ; moyen infaillible d’obtenir un succès au moins transitoire, car les Frétillons sont plus nombreuses dans un pays que les grandes dames, et ce ne sont point les loges, où l’on blâme et l’on applaudit tout bas, c’est le parterre, où l’on siffle à outrance, comme on y bat des mains avec fracas, qui fait la chute ou le succès. Nous serions tenté de dire que, malgré tant de révolutions, on ne connaît bien la violence effrénée de cet orgueil que nous portons tous au fond du cœur, que depuis la révolution française. Ce sentiment d’égalité, qui éleva tant d’échafauds, où monta tout ce qui était grand en France, vertu, naissance, talent, beauté, n’était pas autre chose au fond que l’orgueil implacable et homicide des classes et des natures inférieures qui, prenant à la lettre l’allégorie de Tarquin, l’appliquaient à bras de bourreau, non plus sur des pavots, mais sur des hommes. On connaît cette illusion d’optique qui fait croire à ceux qui naviguent entre les rives d’un fleuve que ce sont ces rives qui fuient, et que le navire reste immobile : par une illusion contraire, ceux qui renversèrent la royauté, le clergé, la noblesse, puis bientôt après la bourgeoisie, ayant abaissé le niveau qu’ils voyaient au-dessus de leur tête, crurent s’être élevés. Il ne faut rien négliger en histoire, et les mots mêmes servent à pénétrer les secrètes pensées des partis. Ainsi, quel fut le berceau et le symbole du parti de l’égalité ? Ce fut la Montagne. Ceux qui ne parlaient que de tout