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Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/260

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la veille du jour où tant d’officiers de l’armée pouvaient prétendre à en mériter une semblable.

Madame de Châteauroux, que les lettres du roi ne rassuraient point encore assez, avait prié le maréchal de Noailles de l’instruire lui-même de ce qui se passerait à l’armée ; il lui avait déjà mandé le bon effet qu’avait produit l’arrivée du roi, et comment il se faisait chaque jour plus chérir des soldats.

Elle lui écrivait en retour :

« Je ne saurais trop vous remercier, monsieur le maréchal, de toutes vos attentions, et des marques d’amitié que vous me donnez ; tout ce que vous me mandez du roi ne me surprend pas. J’étais bien sûre que, dès qu’il serait connu, il serait adoré ; ce sont deux choses inséparables[1], etc., etc. »

Bientôt arriva la nouvelle de la reddition de Courtray et de la prise de Menin, après sept jours de tranchée. Voltaire et tous les auteurs des mémoires du temps constatent que le roi y fit preuve de beaucoup de bravoure ; qu’il reconnut plusieurs fois la place, et s’approcha de la palissade à portée du pistolet, avec le maréchal de Noailles, le comte d’Argenson et toute la cour. Il encourageait les travailleurs par ses libéralités, et animait les troupes par sa présence.

C’était la première conquête du roi ; il voulut en rendre grâce au Ciel ; peut-être aussi crut-il devoir en remercier celle dont les conseils avaient autant de part à sa gloire. Il invita trois princesses du sang, dont les maris, les frères, combattaient pour le roi, à se rendre à Lille pour assister au Te Deum qui serait chanté dans la cathédrale : la duchesse de Lauraguais et la duchesse de Châteauroux reçurent la même invitation, et l’on peut juger facilement de la joie de cette dernière en recevant la permission, peut-être trop hâtive, de rejoindre celui qu’elle aimait.

— Vous ne pouvez partir, disait madame de Mirepoix à la duchesse de Châteauroux, sans prendre congé de la reine ; songez que vous êtes dame du palais, et qu’il ne faut pas avoir l’air de quitter Versailles sans permission.

— Je ne suis pas de cet avis, disait la duchesse de

  1. Lettres autographes de la duchesse de Châteauroux au maréchal de Noailles. (Manuscrits de la bibliothèque royale.)