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Page:Nichault - Le Comte de Guiche.djvu/14

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qu’à propos de la réprimande qu’ils valurent au petit Armand de Guiche.

IMPROMPTU.

       Je pensais que la destinée,
       Après tant d’injustes malheurs,
       Vous a justement couronnée
       De gloire, d’éclat et d’honneurs ;
       Mais que vous étiez heureuse,
       Lorsque vous étiez autrefois,
       Je ne veux pas dire amoureuse,
       La rime le veut toutefois.
       
       Je pensais que ce pauvre amour.
       Qui toujours vous prêta ses armes,
       Est banni loin de votre cour,
       Sans ses traits, son arc et ses charmes.
       Et ce que je puis profiter.
       En passant près de vous ma vie,
       Si vous pouvez si maltraiter
       Ceux qui vous ont si bien servie.

       Je pensais, car nous autres poëtes.
       Nous pensons extravagamment,
       Ce que, dans l’humeur où vous êtes.
       Vous seriez, si dans ce moment,
       Vous avisiez en cette place
       Venir le duc de Buckingham ?
       Et lequel serait en disgrâce
       De lui ou du père Vincent ?

Ces vers, familiers de plus d’une manière, que, dans toute autre disposition, on aurait pu trouver assez impertinents, furent très-bien accueillis, grâce à l’émotion agréable que le nom du beau lord faisait toujours éprouver à Anne d’Autriche et à la protection que madame la princesse, qui était présente, portait à Voiture.

On lui fit redire plusieurs fois son improvisation, et la reine, n’ayant pas l’air d’en comprendre la hardiesse, en demanda une copie, à la condition qu’il n’y en aurait point d’autre.

On n’usait pas alors l’intelligence et la mémoire des enfants par des études précoces. Armand avait sept ans, et il savait à peine lire ; mais sa mémoire sans aliment s’atta-