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Page:Nichault - Un mariage sous l empire.djvu/295

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convalescence qui rendait ses soins nécessaires et lui donnait l’occasion de révéler tout ce que son cœur recelait de tendresse, tout ce que sa bonté avait de grâce.

Une lettre de son père l’attendait à Metz ; il lui mandait que la preuve de confiance qu’elle lui avait donnée en partant l’avait tiré de son affreuse situation : il finissait en disant que, malgré nos revers et l’état dans lequel revenait le reste de notre grande armée, le retour de l’empereur à Paris avait ranimé les esprits : on comptait sur les ressources de son génie pour réparer nos pertes et sur de prochains succès pour ramener le crédit ; enfin, il espérait que les affaires reprendraient leur cours ordinaire et lui donneraient les moyens de s’acquitter.

Dans cette espérance, madame de Lorency pensa qu’il était inutile d’instruire Adhémar de l’engagement qu’elle avait pris pour son père ; certaine de rentrer bientôt dans ses biens, M. Brenneval ayant assez de recouvrements à faire pour remplacer sa caution. Hélas ! il ne devait pas en être ainsi ! Mais, alors même, on était loin de prévoir l’envahissement et la ruine de cette belle France !

Malgré les prières, les menaces qui arrivaient cachetées d’heure en heure à M. de Lorency, il s’obstina à partir de Metz sans voir la princesse Ranieska. On supposera sans peine le dépit qu’elle en éprouva et la haine qu’elle conçut pour Ermance, car elle n’hésita point à l’accuser de ce qu’elle appelait un procédé infâme de la part d’Adhémar.

Enfin ils aperçurent le dôme de Sainte-Geneviève, et madame de Lorency se sentit tout à coup oppressée ; une tristesse invincible s’empara d’elle en pensant qu’elle allait peut-être retrouver tous les tourments qui l’avaient assaillie dans cette ville des plaisirs. L’idée de revoir son enfant se présenta pour la première fois douloureusement à son esprit ; elle redouta l’accueil que son mari ferait à Léon, et tout l’enchantement de sa situation présente se dissipa comme un rêve.

Ces sortes de pressentiments trompent rarement, car ils ne sont au fond que des prévoyances.

À peine arrivé, lorsqu’il revit les lieux témoins de leur