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Page:Nichault - Un mariage sous l empire.djvu/78

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gnité d’Adhémar ! non jamais ! J’ai mérité d’être repoussée du monde entier ; tous ont le droit de rejeter mes vœux, de rire de mes prières, mais Adrien ! lui qui a profité de mon dépit, de mon désespoir pour me déshonorer, pour me livrer à toutes les tortures d’un supplice éternel ! lui qui m’enlève pour jamais à l’amour que la résignation, la vertu allaient m’obtenir, lui doit m’obéir et respecter le remords qui me tue !

Alors, prenant une plume, elle traça à la hâte quelques mots pour conjurer Adrien de l’oublier. Ce billet, écrit sans réserve, sans aucune de ces phrases calculées par la prudence, était l’expression vraie du repentir et de la crainte : c’était la prière d’un ange déchu, et l’homme le plus dépravé n’aurait pu s’empêcher d’y être sensible.

M. de Kerville, avec les manières d’un fat, n’en avait pas positivement le caractère ; la pruderie, les dédains affectés le rendaient avantageux ; mais la confiance d’une âme noble, le secret d’une faiblesse qui faisait couler des larmes sincères étaient encore l’objet de son respect. Trop fier ou trop léger pour s’obstiner à conserver une conquête obtenue par la ruse bien plus que par l’amour, il se laissa toucher par la prière d’Ermance, et lui promit, non sans témoigner de vifs regrets, de ne plus chercher à se rappeler à elle.

Cette réponse parvint à madame de Lorency au moment de son retour au château de Nanteil, et lui rendit un peu de calme :

— Le ciel prend pitié de moi ! dit-elle ; je serai seule malheureuse !



XIV


Un mois s’était déjà écoulé ; Ermance ne se rétablissait point. Son état de langueur était attribué par les médecins à la fatigue qui résulte parfois des bains d’eaux minérales. Son père croyait que l’absence d’Adhémar en était la principale cause, et lui écrivait sans cesse de revenir. Mais les négociations ne se terminaient point ; les prétentions de l’empereur, s’élevant en raison de ses triomphes, rendaient le traité plus