Page:Nietzsche - Considérations inactuelles, I.djvu/51

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s’écrie-t-il, mais croirait-on que cela puisse apparaître aussi comme une qualité ? » — « Celui qui roule l’idée musicale péniblement et jusqu’à en perdre haleine aura l’air de manier ce qu’il y a de plus difficile et d’être le plus fort » (pp. 355, 356). Voilà un aveu, et non point de Beethoven, mais un aveu du « prosateur » classique au sujet de lui-même. Lui, le célèbre auteur, les Grâces ne le laissent point en route. Depuis le jeu des plaisanteries légères — les plaisanteries de Strauss, — jusqu’aux hauteurs du plus grand sérieux — le sérieux de Strauss — elles demeurent à ses côtés sans se laisser troubler par rien. Lui, l’artiste classique de la prose, porte facilement sa charge, et comme en se jouant, tandis que Beethoven, hors d’haleine, la roule péniblement. Il semble folâtrer avec son poids. C’est là un avantage. Mais croirait-on que cela peut également être une lacune ? — Tout au plus chez ceux-là qui font passer le baroque pour quelque chose de génial, l’informe pour le sublime — n’est-ce pas, Monsieur le favori folâtre des Grâces ?

Nous n’envions à personne les satisfactions qu’il se procure dans le silence de sa chambrette, ou dans un nouveau ciel spécialement apprêté pour lui. Mais de toutes les satisfactions possibles, celle de Strauss est pourtant une des plus singulières. Car, pour s’édifier, un petit holocauste lui suffit. Il jette doucement dans le feu les œuvres les plus sublimes