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HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE

leure part. Certains animaux incitent l’homme par des regards, des sons et des attitudes à se voir transporté en imagination dans le corps de ceux-ci, et certaines religions enseignent à voir parfois dans l’animal le séjour des âmes des hommes et des dieux : c’est pourquoi elles recommandent de nobles précautions et même une crainte respectueuse dans les rapports avec les animaux. Lors même que cette superstition aurait disparu, les sentiments éveillés par elle continuent leurs effets, mûrissent et portent leurs fruits. On sait qu’à ce point de vue le christianisme a montré qu’il était une religion pauvre et rétrograde.

58.

Nouveaux acteurs. — Il n’y a pas de plus grande banalité parmi les hommes que la mort ; au second rang arrive la naissance, parce que sans naître on peut pourtant mourir ; et ensuite le mariage. Mais toutes ces petites tragi-comédies qui se jouent, à chacune de leurs représentations, infiniment nombreuses, sont toujours interprétées par de nouveaux acteurs et ne cessent par conséquent point d’avoir des spectateurs intéressés : alors qu’il faudrait plutôt croire que tous les spectateurs de cette vallée terrestre en auraient déjà conçu un tel ennui qu’ils se seraient pendus à tous les arbres. Ce sont les nouveaux acteurs qui importent et si peu la pièce !

59.

Qu’est-ce « être obstiné » ? — Le chemin le plus