Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

on ne doit recevoir celle-ci qu’avec la plus profonde reconnaissance et dans la plus grande humilité. On spécule sans cesse sur le ressentiment que les inférieurs éprouvent à l’égard de tout ce qui est vénéré : on les séduit par une doctrine qu’on leur présente comme la contre-partie de la sagesse du monde, de la puissance du monde. Cette doctrine convaincra les réprouvés et les déshérités de toute espèce ; elle promet le salut, l’avantage, le privilège aux effacés et aux humbles ; elle fanatise les pauvres petits cerveaux insensés, pour les remplir d’une vanité folle, comme si c’était elle qui fût le sens et le sel de la terre. - Tout cela, pour le dire encore une fois, ne peut être assez méprisé : nous nous épargnons la critique de la doctrine ; il suffit de voir les moyens dont elle se sert pour savoir à quoi on a affaire. Elle s’est accordée avec la vertu, elle a accaparé honteusement, pour son propre usage, toute la puissance fascinatrice de la vertu… elle s’est accordée avec la séduction du paradoxe, avec le besoin de poivre et de non-sens propre aux vieilles civilisations, elle a déconcerté et révolté, elle a excité à la persécution et aux mauvais traitements. - C’est exactement la même façon de bassesse réfléchie qui servit aux prêtres juifs à affermir leur pouvoir et à créer ainsi l’Église juive… Il faut distinguer : 1) cette chaleur de la passion qui est l’" amour " (reposant sur un fond de sensualité