Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/206

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fait appel en tant que force conservatrice, renforçant ainsi cet instinct déjà puissant chez l’être faible, de se ménager, de se conserver, de se soutenir mutuellement Qu’est la "vertu" et la " charité " dans le christianisme, si ce n’est cette réciprocité dans la conservation, cette solidarité des faibles, cette entrave de la sélection ? Qu’est l’altruisme chrétien, sinon l’égoïsme collectif des faibles qui devine que si tous veillent les uns pour les autres, chacun sera conservé le plus longtemps ?… Si l’on ne considère pas un pareil état d’esprit, comme le comble de l’immoralité, comme un attentat à la vie, on fait partie de ce ramassis de malades et on en a les instincts… Le véritable amour des hommes exige le sacrifice au bien de l’espèce, — il est dur, il est fait de victoires sur soi-même, parce qu’il a besoin du sacrifice humain. Et cette pseudo-humanité qui s’appelle christianisme veut justement arriver à ce que personne ne soit sacrifié…

152.

Rien ne serait plus utile et ne devrait être autant encouragé qu’un nihilisme de l’action avec toutes ses conséquences. — De même que je comprends tous les phénomènes du christianisme, du pessimisme, de même je les exprime : " Nous sommes mûrs pour ne pas être ; pour nous il est raisonnable de ne pas être. " Ce langage de la " raison" serait aussi, dans ce cas, le langage de la nature sélec