Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/236

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pensée : si l’homme n’est pas cause première, en tant que volonté, il est irresponsable, — par conséquent il n’est pas de la compétence morale, — la vertu et le vice seraient donc automatiques et machinaux… En somme : pour que l’homme puisse avoir du respect devant lui-même il faut qu’il soit capable aussi de devenir méchant.

170.

Nous élèverions des doutes au sujet d’un homme si nous entendions qu’il a besoin de raisons pour demeurer honnête : ce qui est certain c’est que nous éviterions de le fréquenter. Ce petit mot de " car " compromet dans certains cas ; il suffit même parfois d’un seul " car " pour se réfuter. Si nous apprenons, dans la suite, qu’un tel aspirant à la vertu a besoin de mauvaises raisons pour rester respectable, ce n’est pas cela qui nous poussera à augmenter notre respect pour lui. Mais il va plus loin encore, il vient à nous et il nous dit en plein visage : " Vous troublez ma moralité avec votre mauvaise foi, monsieur l’incrédule ; aussi longtemps que vous ne croyez pas en mes mauvais arguments, je veux dire en Dieu, en un au-delà qui punit, en un libre arbitre, vous mettez entrave à ma vertu… Morale : il faut supprimer les incrédules : ils empêchent la moralisation des masses. " Aujourd’hui nous accueillons avec une l