Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/252

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Toute cette psychologie est une psychologie de l’entrave, une sorte d’emmurage par crainte ; d’une part le grand nombre (les déshérités et les médiocres) veut se mettre en garde contre les plus forts ( - et les détruire dans leur développement), et, d’autre part, il veut sanctifier et faire garder seuls en honneur les instincts qui le font le mieux prospérer lui-même. Comparez le sacerdoce juif.

185.

Comment, sous la pression de la morale ascétique du renoncement de soi, les sentiments de l’amour, de la bonté et de la pitié, même ceux de la justice, de la générosité, de l’héroïsme, furent-ils précisément méconnus : Chapitre principal. Ce sont la richesse de la personnalité, la plénitude de soi, la surabondance et le don, le bien-être instinctif et l’affirmation de soi qui constituent le grand sacrifice et le grand amour : c’est un fort et divin personnalisme d’où sortent ces passions, avec autant de certitude que le désir de dominer, d’empiéter, que la certitude intérieure d’avoir un droit sur tous. Les sentiments contraires, selon l’acception commune, sont bien plutôt un même sentiment ; et si l’on ne reste pas dans sa peau, ferme et brave, on n’a rien à donner et il est bien inutile de tendre la main pour protéger et soutenir… Comment a-t-on pu transformer le sens de ces instincts, au point que l’homme a pu consi