Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/282

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détermine toute la métaphysique, toute la psychologie, toute la science historique, mais avant tout la morale. Partout où est allée la pensée humaine, elle a entraîné dans les choses le bacille de la vengeance. Elle a rendu malade, par son moyen, Dieu lui-même, elle a privé l’existence entière de son innocence : et cela en ramenant tout état de faits à une volonté, à des intentions et des actes de responsabilité. Toute la doctrine de la volonté, cette falsification néfaste dans la psychologie tout entière, a été principalement inventée en vue de la punition. C’était l’utilité sociale de la punition qui garantissait à cette idée sa dignité, sa puissance, sa vérité. Il faut chercher les promoteurs de cette psychologie - la psychologie de la volonté - dans les classes qui ont la pénalité entre les mains, avant tout dans la classe des prêtres qui se trouvaient à la tête des plus anciennes communautés : ceux-ci voulaient s’arroger le droit de se venger, — ils voulaient créer pour Dieu un droit à la vengeance. Dans ce but l’homme était imaginé " libre " ; dans ce but toute action devait être imaginée comme voulue, l’origine de toute action se trouvant dans la conscience. Mais, par ces propositions, la vieille psychologie est réfutée. Aujourd’hui que l’Europe semble être entrée dans le mouvement contraire, que nous autres Alcyoniens nous nous efforçons d’extirper de nouveau du monde l’idée de faute et de punition, aujourd’