Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/310

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as se reproduire. L’inconvénient, c’est qu’une certaine incapacité de se " dominer " ( - de ne pas réagir contre certaines excitations, contre les plus petites excitations sexuelles) fait précisément partie des conséquences de l’épuisement général. On se méprendrait si l’on imaginait par exemple un Léopardi chaste. Le prêtre, le moraliste jouent là un jeu perdu d’avance ; il vaudrait mieux encore envoyer chez le pharmacien. En dernière instance, il reste à la société à remplir un devoir : il existe peu d’exigences aussi pressantes, aussi absolues que l’on puisse lui adresser. La société, grand mandataire de la vie, porte devant la vie, la responsabilité de toute vie manquée, — elle pâtit aussi de celle-ci, donc elle doit l’empêcher. Dans les cas nombreux, la société doit empêcher la procréation : elle peut se réserver pour cela, sans égard à l’origine, le rang et l’esprit, les mesures coercitives les plus dures, la privation de la liberté, dans certaines circonstances même la castration. — La défense de la Bible " Tu ne tueras point ! " est une naïveté à côté du sérieux de la défense vitale adressée aux décadents : " Vous n’engendrez point ! "… La vie elle-même ne reconnaît pas de solidarité, pas de " droits égaux " entre les parties saines et les parties dégénérées de son organisme : il faut éliminer ces dernières - autrement l’ensemble périt. — La compassion avec les décadents, les droits égaux, même pour les malvenus - ce serait la plus profonde immoralité, ce