Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/83

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la fascination de la démence, la rancune populacière érigée en justicière, la vanité insensée du faible.

30.

Contre Rousseau. — L’état primitif de la nature est épouvantable, l’homme est une bête féroce, notre civilisation est un triomphe inouï ; sur cette nature de bête féroce ; — ainsi concluait Voltaire. Il ressentait les adoucissements, les raffinements, les joies intellectuelles de l’état civilisé ; il méprisait l’esprit borné même sous couleur de vertu, le manque de délicatesse, même chez les ascètes et les moines.

Rousseau semblait préoccupé par la méchanceté morale de l’homme ; c’est avec les mots " injuste " et " cruel " que l’on excite le mieux les instincts des opprimés, qui se trouvent généralement sous le coup du vetitium et de la disgrâce : en sorte que la conscience leur déconseille les velléités insurrectionnelles. Ces émancipateurs cherchent avant tout une chose : donner à leur parti les accents profonds et les grandes attitudes des natures supérieures.

31.

Les points culminants de la culture et de la civilisation se trouvent séparés : il ne faut pas se laisser égarer sur l’antagonisme profond qu’il