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LES DISCIPLES À SAÏS

beauté nouvelle, et seul l’homme qui ne pense pas rejette avec mépris les mots illisibles et étrangement mêlés. Le prêtre dépose sur l’autel, avec reconnaissance, cette science nouvelle et sublime à côté de l’aiguille magnétique qui jamais ne se trompa et ramène par les routes sans traces de l’Océan d’innombrables vaisseaux aux côtes coutumières et dans les ports de la patrie. À côté du penseur, il y a encore d’autres amants du savoir, qui sans s’appliquer spécialement à produire par la pensée, et sans vocation pour cet art, aiment mieux devenir des disciples de la Nature et trouvent plus de joie à apprendre qu’à enseigner, à éprouver qu’à agir, à recevoir qu’à donner. Quelques-uns ne sont pas inactifs et, sachant l’omniprésence et les affinités universelles de la Nature, et convaincus d’avance du caractère incomplet et de la continuité de toute chose particulière, ils choisissent avec soin un phénomène, et tiennent l’œil obstinément fixé sur l’esprit de ce phénomène qui revêt mille formes changeantes. Puis, à l’aide de ce fil conducteur, ils parcourent tous les recoins du laboratoire afin de pouvoir dresser la carte des routes de ce labyrinthe. Lorsqu’ils ont achevé ce pénible travail, un esprit plus élevé les pénètre à leur insu, et il leur devient facile de raisonner de la carte qu’ils ont devant eux et de montrer le chemin à ceux qui le cherchent. Leur travail est d’une utilité inappréciable, et les contours de leur carte concorderont d’une façon surprenante avec le système du penseur. À la grande consolation de celui-ci, ils