Page:Observations sur Le festin de pierre.djvu/79

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s’estre fait un personnage qu’il a cru le plus propre pour luy ? Ne nous dites point qu’il tasche d’expliquer par ses grimaces ce que son Agnès n’oseroit avoir dit par sa bouche. Nous sommes dans un siecle où les hommes se portent assez d’eux-mesmes au mal, sans avoir besoin qu’on leur explique nettement ce qui peut en avoir quelque apparence.

Monsieur de Moliere, qui connoist le faible des gens, a préveu fort favorablement qu’on tourneroit toutes ces equivoques du mauvais sens, et pour prevenir une censure aussi injuste que nuisible, il fit voir l’innocence et la pureté de ses sentimens, par un discours le mieux poly et le plus coulant du monde ; mais il ne s’est jamais defié qu’on deust faire le mesme tort à son Festin de Pierre : et il s’est si bien imaginé qu’il estoit assez fort de luy-mesme, pour ne point apprehender ses Envieux, qu’il n’a jamais voulu luy donner des nouvelles armes en travaillant pour sa deffense, et comme j’ay connu par là qu’il n’avait pas besoin d’un grand secours, j’ay creu que ma plume, toute ignorante et toute sterile qu’elle est, pouvoit suffire pour monstrer l’injustice de ses ennemis.

Lorsqu’on veut monstrer la bonté d’une cause qui fournit elle seule toutes les raisons qu’il faut pour la soustenir, il me semble qu’il est plus à propos d’en laisser le soin au plus jeune Advocat du Barreau, qu’au plus celebre et au plus eloquent, et par la mesme raison qu’on croit plustost un Paysan qu’un homme de Cour, les ignorans persuadent beaucoup mieux que les plus habiles orateurs. Il est si fort ordinaire à