Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/197

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CHANT CINQUIÈME.

 
Le verbe égal à Dieu, splendeur de sa lumière,
Avant que les mortels sortis de la poussière,
Aux rayons du soleil eussent ouvert les yeux :
Avant la terre, avant la naissance des cieux,
Eternelle puissance, et sagesse suprême,
Le verbe était en Dieu, fils de Dieu, Dieu lui-même.
Fils de Dieu, cependant fils de l’homme à la fois,
Peut-il toujours égal… je m’arrête, et je crois.
Faible et fière raison, dépouille ton audace.
Le vent souffle : qui peut en découvrir la trace ?
Etonnés de son bruit, nous sentons son pouvoir :
Notre oreille l’entend, notre œil ne le peut voir.
Quelque trouble ici bas que mon âme ressente,
La foi, fille du ciel, devant moi se présente.
Sur une ancre appuyée, elle a le front voilé ;
Et m’éclairant du feu dont son cœur est brûlé,
Viens, dit-elle, sur moi. L’éclat que je fais luire,
Quand tu baisses les yeux, suffit pour te conduire.
Est-ce le temps de voir, que le temps de la nuit ?
En attendant le jour, docile à qui t’instruit,
Tu dois à chaque pas, plus adorer qu’entendre,
Plus croire que savoir, et plus aimer qu’apprendre
Faut-il, dit le déiste, enchaîner sa raison ?
N’est-elle pas du ciel le plus précieux don ?
Et pouvons-nous penser qu’en nous l’Etre suprême
Veuille étouffer un feu, qu’il alluma lui-même ?