Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/131

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ME. 125

bras du meurtrier. Tels des navires qui se laissent aller au courant pendant les ténèbres, ne voient pas les écueils sur lesquels ils glissent. Matilde continua donc, sans s’interrompre, la fin de l’histoire de Mortham. Il parlait de ses richesses comme d’un fardeau dont la fortune avait voulu l’accabler dans une amère dérision, et pour aggraver ses éternelles douleurs ; mais cependant il suppliait Matilde de conserver ses trésors pour les rendre un jour à son fils, au fils d’Edith… car il ne pouvait cesser de croire qu’il vivait encore. Il attestait que, dans de fréquentes visions, il avait vu ses traits et entendu sa voix : et ajoutant à ces preuves vagues des raisons plus positives, il disait que, si son fils avait péri, on eût reconnu les traces de son sang et son cadavre sans vie. Il avait aussi entendu dire que, dans le temps, on avait vu dans la baie de Windermere, un navire étranger, dont l’équipage gardait avec précaution, mais avec des égards, une femme et un jeune enfant. En réunissant tous ces indices, il sentait l’espérance réveillée dans son cœur. Quelque vague qu’elle fût, cette espérance subjuguait sa raison.

XXVIII.

Son histoire était terminée par ces paroles solennelles : — J’appelle le ciel à témoin que si j’ai pris parti dans cette funeste guerre civile, je n’ai consulté que les droits de l’Angleterre. Les justes plaintes de mon pays m’ont mis les armes à la main pour défendre l’Evangile et les lois, Aussitôt que la bonne cause aura triomphé, mon glaive rentrera dans le fourreau, et j’irai chercher mon fils dans toute l’Europe. Mes trésors, sur lesquels déjà un proche parent jette des regards avides, seront en sûreté entre les mains de Matilde. Lorsqu’elle apprendra la nouvelle de ma mort, qu’elle garde son dépôt pendant trois années. Si, au bout de ce temps, personne ne le réclame de ma part, le nom de Mortham est éteint et sa famille avec lui. Que la main généreuse de Matilde répande ses bienfaits dans notre patrie malheureuse ; qu’elle