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126 ROKEBY.

adoucisse le sort du prisonnier blessé ; qu’elle fasse rebâtir la cabane démolie. C’est ainsi que les dépouilles des terres étrangères serviront à réparer les malheurs d’une guerre intestine.

XXIX.

Le sensible Redmond, à qui toute la magnanimité de Mortham était connue, donna des larmes aux malheurs qui avaient accablé ce seigneur valeureux. Mais le fils de Wycliffe en fut plus touché encore, lui qui apprenait enfin pourquoi, Mortham ne voulait.pas que l’on sût qu’il avait conservé la vie… Il crut du moins deviner que son projet était d’obéir, sans être connu, aux inspirations de ces sentimens secrets qui lui disaient que son fils n’était pas perdu pour lui. Il demeura pensif et rêveur, en entendant Matilde dire qu’elle désirait partager la captivité de son père, en quelque lieu que fût sa prison. Mais ce fut avec douleur qu’elle ajouta qu’il lui était pénible de voir que le château de Rokeby démantelé, privé de ses défenseurs, et ouvert de toutes parts aux bandits, n’offrait plus de sûreté pour le trésor que lui avait confié l’amitié d’un parent, et destiné par lui à un si noble usage. La forteresse de Barnard serait donc le lieu de votre choix, demanda Wilfrid d’elle voix tremblante, puisque les lois du parti vainqueur condamnent votre père à y rester quelque temps en otage. — En prononçant ces mots, son accent trahit l’espérance qui le flattait, et il y avait aussi dans son regard une joie incertaine.

Matilde se hâta de répondre, car elle s’aperçut que les yeux de Redmond étincelaient de colère. — Le devoir, dit-elle avec une grâce ravissante, le devoir, généreux Wilfrid, n’a point de choix à faire. Si j’étais libre de choisir, je préférerais accompagner mon père dans une prison moins cruelle pour lui que ce sombre fort, d’ou pouvant voir les arbres de ses forets et entendre le murmure de la Tees, il trouvera à chaque pas tout ce qui redouble les regrets d’un captif. Mais plus la captivité sera