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OVIDE

Leur dard sous Hercule est tombé.
Déjanire obtint là ce que n’eût fait Alcide
Pour nul pays Étolien,
Le Nil, aux sept canaux, qui dérobe si bien
Sa source en la zone torride,
Dans ses gouffres ne put éteindre d’Évadné
Le souvenir toujours vivace.,
Enipe, en un lit sec pour que Tyro l’embrasse,
Refoula son cours étonné.

Je ne t’oublierai point, toi qui, de roche en roche,
Cours baigner l’Argienne Tibur,
Toi qu’émut Ilia, quoique en haillons, l’œil dur,
La joue en sang, elle t’approche.
Pleurant les torts d’un oncle et de Mars l’attentat,
Pieds nus, Ilie errait farouche.
Le Fleuve l’aperçoit de son humide couche,
Se dresse, et, rauque potentat :
« Quel désespoir, dit-il, te pousse vers nos berges,
Ô fille de Laomédon ?
Pourquoi seule marcher ? d’où naît cet abandon ?
Qu’as-tu fait du bandeau des vierges ?
Pourquoi d’amers ruisseaux inonder tes grands yeux,
Meurtrir ton flanc d’un bras sauvage ?
Il est de roc, de fer, celui qu’un beau visage
Éploré — laisse dédaigneux.
Ilia, calme-toi : mes palais te désirent,
Mes flots t’aimeront ; calme-toi.