Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour représenter cette partie déchue et maudite de l’humanité. A Lyon, c’est sainte Blandine en Afrique, sainte Félicité ; sainte Potamienne, d’Alexandrie, qui, sommée par le juge de répondre aux désirs passionnés de’son maître « A Dieu neplaise, s’écria-t-elle, que je trouve un juge assez inique pour me contraindre à obéir à la luxure de mon maître ! »

Dès ce jour la conscience est reconstruite, la personne relevée, et l’esclave ne fera plus qu’accomplir une servitude volontaire. Pour lui, désormais, le péril ne sera pas de se mépriser lui-même, mais de mépriser son maître. Aussi, dès les premiers siècles, saint Ignace exhorte les esclaves à ne point mépriser leurs maîtres, à né se point laisser entraîner par l’orgueil de la chaîne purifiée dont ils étaient chargés. Plus tard, saint Jean Chrysostome répond à ceux qui lui demandent pourquoi le christianisme n’a pas tout d’un coup affranchi les esclaves « C’est afin de vous apprendre l’excellence de la liberté. Car, de même qu’il est plus grand de conserver les trois enfants s’ils restent dans la fournaise, ainsi il y a moins de grandeur à supprimer la servitude qu’à montrer la liberté jusque dans les fers[1]. » Ainsi commençait l’affranchissement de l’humanité, par l’âme ; par en haut, comme le chris-

  1. S. Jean. Chrisost., in Ep. I, ad Corinth. Homelie 19