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DES SAINTS INNOCENTS

Ah sans doute si Joinville avec les yeux de l'âme avait

vu Ce que c'est que cette lèpre de l'âme Que nous ne nommons pas en vain le péché mortel, Si avec les yeux de l'àme il avait vu Cette pourriture sèche de l'âme infiniment plus mau- vaise, Infiniment plus laide, infiniment plus pernicieuse, Infiniment plus maligne, infiniment plus odieuse Lui-même il eût tout de suite compris combien son pro- pos était absurde. Et que la question ne se pose même pas. Mais tous ne

voient pas avec les yeux de l'âme. Je comprends cela, dit Dieu, tous ne sont pas des

saints, ainsi est ma chrétienté. Il y a aussi les pécheurs, il en faut, c'est ainsi. C'était un bon chrétien, tout de même, ensemble, c'était

un pécheur, il en faut dans la chrétienté. C'était un bon Français, Jean, sire de Joinville, un baron

de saint Louis. Au moins il disait ce qu'il pense, des gens-là font le gros de l'armée. Il faut aussi des

troupes. Il ne suffit pas d'avoir des chefs qui marchent

en tête. Ces gens-là partent fort honnêtement en croisade, au

moins une fois sur les deux, et font très hoimêtement

la croisade. Ils se battent très bien et se font tuer très proprement

et gagnent le royaume du ciel Tout comme mi autre. (Je veux dire comme un autre gagnerait le royaume du

ciel.

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