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LE ROMAN DU COMTE DE TOULOUSE.

groupe catalan, ― récit des chroniqueurs Bernard Desclot (fin du xiiie siècle), Carboneli (fin du xv), Beuter (xvie siècle), auxquels se rattachent une romance espagnole (xve siècle), et, quoique avec l’immixtion d’éléments étrangers, la source inconnue où ont puisé deux chroniques écrites en Provence au xviie siècle, celle de César de Nostre-dame et la Couronne des rois d’Arles ; ― puis un poème anglais du xive siècle[1], tiré d’un poème français perdu[2] ; ― un « miracle » français du xive siècle ; ― enfin, un groupe de quatre versions intimement apparentées : un poème danois du xve siècle, deux romans en prose, l’un français (Palanus) et l’autre allemand (Galmi), du xvie siècle, et une nouvelle italienne de Bandello. Laissant de côté les deux chroniques provençales et le miracle français[3], dont les rapports avec les autres versions sont trop vagues ou trop compliqués, je résumerai l’histoire, dans les trois formes, de plus en plus riches, où elle se présente à nous, d’après le groupe catalan ; (I), le poème anglais (II) et le troisième groupe (III). Le rapport de plus ou moins grand développement qui se remarque entre ces trois formes correspond à leur antiquité relative : ce sont trois phases successives de l’évolution du thème.

Je commence par la plus simple et la plus ancienne, celle

  1. Voyez G. Sarrazin, Englische Studien, VII, 136.
  2. Le poème anglais indique à plusieurs reprises un romance, c’est-à-dire un poème français, comme sa source, et il n’y a pas l’ombre d’un doute sur l’exactitude de cette assertion. Mais à la fin il dit : Yn Rome thys gest cronyculyd ys, A lay of Bretayn callyd ywyw And evyr more schall bee. M. Lüdtke attache de l’importance à cette seconde désignation ; je crois qu’elle ne repose sur rien de réel. Elle était peut-être déjà dans l’original français, mais cela ne prouve rien de plus. En France comme en Angleterre, on s’était habitué à appeler lais de Bretagne de courts poèmes narratifs roulant sur des aventures d’amour. En tous cas, la foi qu’exprime M. Lüdtke (p. 89) dans la grande fidélité historique des lais bretons n’est pas justifiée. Il l’appuie sur un passage de Wolf (Ueber die Lais, p. 232) où il s’agit, non des anciens lais, mais des chansons populaires recueillies par La Villemarqué, et on sait aujourd’hui que la prétendue historicité de ces chansons est due en général à l’intervention de l’éditeur.
  3. Je reviendrai, dans une note subséquente, sur quelques-uns des traits particuliers à ces rédactions.